Chronique d’une balade annoncée : suite et fin.

Ainsi il faudrait que je publie un compte rendu de cette balade…

Je devrais coucher sur le papier le détail des étapes, la météo et tous les détails de cette randonnée, combien de temps de temps j’ai ramé, combien de temps j’ai pédalé, comment étaient les campings, l’organisation de la logistique des bivouacs, ce que j’ai mangé et où j’ai satisfait aux besoins de la nature.

Mais non ..

Je ne retiendrais que le bruit de l’eau de cette Loire joueuse sur mon petit kayak, le kaléidoscope des ciels d’été qui bouscule ma paresse tandis que je rêvasse au fil du courant.

Le fleuve, les nuages et le vent que nous verrez pas…

Lorsque après avoir pagayé vigoureusement pour passer des rapides, le fleuve s’élargit pour se vautrer dans les méandres, j’extirpe ma liseuse de mon bidon étanche et je bouquine affalé dans mon embarcation. Maigret traque la vérité dans un Paris brumeux et moi je me laisse glisser dans un écrin de verdure, brulé par le soleil de juillet que tempère la fraicheur de la rivière. Faites-moi monter de la bière et des sandwichs…

Le chant des oiseaux, les bruits de la nuit dans ce bivouac dans la forêt. Le meuglement de la vache appelant son veau, les stridulations des insectes, le gros poisson qui saute dans le fleuve et la cloche d’une église de campagne invisible qui rythme le temps de cet été qui coule comme le sable entre les doigts de la main.

Meuh !

Trois jours d’errance canalisés par le cours du fleuve avec pour seules compagnes les vaches qui, les pieds dans l’eau, regardent passer ces embarcations multicolores qui suivent le courant. Je ne suis pas seul dans cette aventure nonchalante, des équipages la plupart germaniques tracent aussi leur route ? Suis-je bien sur la Loire ou plutôt ne serait-ce pas plutôt le Rhin ??? Et ce français avec qui j’ai échangé quelques mots dans l’un des rares villages traversé, un prisonnier de guerre ???

Mais foin de sarcasmes, l’Europe est enfin une réalité qui se décline jusque dans les aventures minuscules de la navigation ligérienne.

Enfin arrive la terre promise, la cité émerge de la verdure. Le bruit, la route. Comme un avion sans aile, toucher terre, se poser près d’une route. L’exercice consiste ensuite à plier le kayak, à l’ombre si possible et la métamorphose s’accomplit, le transport fluvial devient terrestre. Les roues sortent du sac, se clipsent sur la remorque et rouler jeunesse, le bateau est devenu engin terrestre !

Camping, civilisation, la douche se substitue à la rivière pour la toilette, la cuvette de porcelaine remplace avantageusement le petit bois et les orties qui vous piquent le cul… Et puis la ville toute proche avec son bistrot sur une place écrasée de chaleur où la petite serveuse empruntée vous sert maladroitement une bière fraiche. Balade en vélo, visite d’une église sombre et sans grand intérêt.

Après …

Une journée de vélo dans la campagne. Canicule… Il fait chaud très chaud. Mais c’est l’été, qui irait se plaindre ? La route est longue même si pour alléger l’attelage tout est resté au camping il faut pédaler pour retrouver la voiture laissée au départ de cette coulée douce dans la Loire…

Pédaler dans ces interminables lignes droites, ces parenthèses de forêt et enfin la voie royale, la voie verte, le long du canal. Les pénichettes s’agglutinent aux écluses et moi tout crevé que je suis je les laisse sur place dans un pédalage jouissif et ricaneur…

Après..

Le tonnerre gronde, la pluie s’abat grise et rafraichissante. C’est pour moi le moment de changer de terrain de jeu. Après cette échappée sauvage entre Digouin et Decize, il temps de couper le fromage pour rejoindre le fleuve royal des châteaux , de la doulce Loire…

Escale à Montrichard le temps d’un repas fin et d’une nuit dans une hostellerie au bord du Cher pendant que dame nature s’épanche en pluie d’été.

Le soleil est revenu.

Et une nouvelle navigation au départ de Savonnières, sur le Cher d’abord et la Loire ensuite. A l’embouchure, sur la levée, un camp de romanichels évoque de manière irrésistible le club des 5 et Jo la gitane ou Tintin et le camp aux portes de Moulinsart… Un gamin rigolard me montre son cul, les femmes crient après la marmaille et les hommes débonnaires boutiquent près des voitures et des caravanes… Non plus de chevaux dans cette histoire … Trece timpul…

Cette fois le fleuve est majestueux, même si parfois, au beau milieu, les pelles de ma pagaie raclent souvent les graviers du fond…

Passé Langeais et son château je touche terre à Bréhémont port de la batellerie de Loire. De loin la flèche de son église endosse le rôle du phare breton. Le quai de pierre est propice à l’atterrissage et au pliage de mon attelage.

Bréhémont Harbour

Tous les néo bateaux de Loire sont désormais équipés de moteur… Heureusement  ! Une pitoyable toue cabanée tente de remonter le courant, malgré le vent portant, elle se vautre lamentablement… Les anciens ont bien fait de quitter la piste… sont pas bons les marins d’eau douce d’aujourd’hui…

Derrière les fleurs , la navigation laborieuse d’un « vaisseau » de Loire…

Escale paresseuse, retour au camp de base visite du château tout proche de Villandry et ses jardins merveilleux.

Dans les reflets de Montsoreau, Françoise de Meridor…

Les perles s’enfilent Candes Saint Martin au bord de la Vienne. Nouvelle navigation, vers la le fleuve majestueux. Dans les reflets de Montsoreau, Diane de Méridor, la dame de Montsoreau apparait dans les meneaux de sa fenêtre… Mirage de l’été et le courant me pousse vers Saumur, ses cavaliers que je ne verrai pas, mais son château qui domine le fleuve. Sortie de la rivière dans une trouée de verdure et de nouveau pliage, et randonnée en vélo avec la montée de la bosse de Champigny.

Champigny … Saumur Champigny, Bourgueil, oui les vins de Loire sont bien présents dans cette échappée…

Avec modération mais le rosé bien frais du camping est le bienvenu pour faire oublier les rires et les paroles hautes de ces deux flamandes qui se sont installées à côté de ma tente.

Et puis le temps passe, il est temps de plier les gaules et de retourner vers mon Vianon, retrouver mon Rhône qui doit bouder mes infidélités ligériennes… Et voilà c’est fini.

ou lien vers les photos pour ceux qui n’auraient pas de flash …

 

« Pô, le roman d’un fleuve » de Paolo Rumiz chez Hoëbeke (Paris, France)

 sur 20 Minutes :

Résumé

Collection Étonnants voyageurs dirigée par Michel Le Bris

Pas de plan précis, pour ce voyage : juste un fleuve, un départ et un point d’arrivée. Et puis quelques amis, des canoës, une barcè, un cat-boat à mât inclinable, au fil des jours, jusqu’à la mer et au-delà.
Juste un fleuve, mais le plus grand d’Italie, Sa Majesté le Pô, oublié, abandonné, redevenu sauvage. A travers les régions les plus peuplées d’Italie, industrielles, bruyantes, polluées, certes, mais à peine livrées au cours du fleuve, Paolo Rumiz et ses compagnons découvrent un espace vierge d’une rayonnante beauté, et un silence tel qu’ils se surprennent à chuchoter…
Paolo Rumiz voulait «entendre la voix du Pô» – mais voilà, toutes amarres rompues, que cette voix bientôt l’emporte au-delà, très loin, quelque part du côté de l’Hudson et du Saint-Laurent, du Zambèze et de la Léna, du Mékong et du río Grande, à croire qu’un fleuve est tous les fleuves du monde.
Un voyage au plus près, des sensations, des rencontres, des dialectes, des mets et des vins du «peuple du fleuve», qui s’ouvre peu à peu jusqu’à l’immense, dans le temps même qu’il se fait voyage intérieur. Jamais l’auteur ne s’était ainsi livré, dans ce livre tout simplement magique.

Paolo Rumiz, né à Trieste en 1947, tenu pour le plus grand écrivain-voyageur en Italie, est en passe de le devenir en France depuis la publication de ses deux premiers livres : Aux frontières de l’Europe et L’Ombre d’Hannibal.

«Quand le voyage devient un art d’appréhender, dans le même mouvement, l’espace et le temps. Et la littérature, un bain d’humanité.»
Michel Abescat, Télérama.

La revue de presse : Marc Semo – Libération du 10 avril 2014

Ce fleuve immense, un des plus longs d’Europe avec ses quelque 700 kilomètres, traverse les régions les plus peuplées, les plus industrielles et les plus riches de la péninsule, mais le Pô reste sauvage et mystérieux derrière les hautes levées destinées à protéger les campagnes de ses inondations, qui le rendent ainsi le plus souvent invisible…
Ce récit picaresque, tour à tour érudit, grinçant ou émouvant est celui d’une aventure, avec ses protagonistes bien campés et surtout leurs rencontres tout au long de la descente du fleuve. Il y a Marina la Russe, vivant sur une île près du delta, où elle retrouve l’immensité sauvage de la Volga. Il y a les fous d’opéra, qui dans leurs cahutes au nord de l’eau écoutent à plein régime les arias de Verdi, et les dingues du blues quand, à l’amorce de son dernier tiers, le Pô alangui prend des airs de Mississippi, évoquant un «sud d’avant la guerre de Sécession, avec les ruines ensablées d’énormes dragues à vapeur et des guinguettes clinquantes».

La revue de presse : Marcelle Padovani – Le Nouvel Observateur du 27 mars 2014

C’est l’histoire d’un fleuve, le plus imposant d’Italie : « la dernière terre d’aventure de la Péninsule », dit Paolo Rumiz…
Oui, par-delà la nostalgie pour la beauté d’une Italie disparue, ou en voie de disparition, le livre signé Paolo Rumiz et intitulé «Pô, le roman d’un fleuve» est une histoire de civilisation. Le récit envoûtant des mille sortilèges d’une descente du Pô en canoé. Le Pô, le fleuve le plus imposant d’Italie avec ses 652 kilomètres, qui parcourt la Padanie (l’Italie du Nord) comme un serpent, passant par Turin, Milan, Ferrare et Plaisance avant de s’abîmer dans l’Adriatique…
En écoutant la voix du fleuve, de ce monde mythique en voie de disparition, en racontant comment chaque kilomètre a été une découverte, Paolo Rumiz a fait du Pô un espace de légende…
Paolo Rumiz, admirablement traduit par Béatrice Vierne, vient d’écrire la plus belle des «initiations au fleuve».

La revue de presse : Marine de Tilly – Le Point du 27 mars 2014

Dans « Pô, le roman d’un fleuve », le grand reporter Paolo Rumiz fait de son aventure un roman, un voyage intérieur entre deux eaux, deux rives, deux rêves…
Pourquoi le lire ?…
Parce que c’est un roman, c’est même annoncé dans le titre, c’est une aventure, c’est un roman d’aventures. Parce que c’est un fleuve, oui, mais de papier, beau à contempler, beau à traverser, beau à se damner, avec ses affluents, ses confluents qui vous embrassent comme des lassos et font tourner la tête. Parce que c’est un voyage, oui, mais intérieur, pourquoi pas une illusion, le songe enchanté d’une nuit ou de toute la vie. Et parce que quand c’est trop beau pour être vrai, a priori, c’est que le romancier a bien fait son travail. Paolo Rumiz est un revenant. Un lémure du temps bénit où le roman était romanesque, et où c’était encore un pléonasme.

Retrouvez la fiche complète sur le choix des libraires

Chronique d’une balade annoncée (10) : au rapport !

C’est donc samedi matin de ce weekend prolongé de Pentecôte que je me suis lancé avec mon attelage chargé à bloc, histoire de voir si l’ensemble tient le coup sur la distance.

Quand je dis chargé à bloc, c’est bien le cas car je outre le kayak son équipement, la logistique de randonnée (tente, couchage …) j’embarque plusieurs jours de vivre plus appareil photo, téléphone, batteries de secours … Au total l’ensemble dépasse les 60 kg !

Juste arrivé au bord du Rhône avec le montage initial de la glacière sur le bidon…

C’est beaucoup, beaucoup trop mais c’est un test… et qui peut le plus …

Départ de la maison avec une descente bien raide pour rejoindre la Viarhôna la piste cyclable qui longe le fleuve.

Si l’objectif est bien de tester l’ensemble sur route, je comptais bien effectuer une partie en navigation également…

Hélas ! Le vent du sud est fort, trop fort levant un fort clapot contre le courant…. Ce type de vent je le connais bien et sur l’eau c’est la galère assurée : il faudrait pagayer comme un malade pour essayer de descendre un peu… Bernique j’ai déjà donné, surtout avec un bateau chargé et le fardage des bagages embarqués. Je renonce donc à la navigation mais ce n’est pas grave car l’objectif est de rouler…

Sitôt la piste rejointe les ennuis commencent : le chargement de la glacière qui contient la bouffe ne tient pas. J’ai dû le percher sur mon bidon comme on voit sur les photos sinon cela me gène pour pédaler… Je tente une première modification en ficelant la glacière sur la remorque… mais la solution ne me convient pas : je dépasse alors allègrement les 40 kg de charge utile de la remorque.

Essai de placer la glacière sur la remorque

Certes celle ci semble encaisser la surcharge sans broncher mais je préfère trouver une autre solution et finalement je parviens à poser la glacière directement sur le porte bagage en intercalant mon bidon (qui contient les papiers, le téléphone, les batteries…) entre la glacière et la tige de selle ce qui me permet de pédaler sans difficulté et sans accrocher la glacière avec mes pieds.

Cette fois le chargement sur le vélo tient bien !

Une fois cet aménagement réalisé tout baigne et je peux me lancer. Je suis sur terrain plat mais avec 20 noeuds de vent en rafale dans le paf…Néanmoins je maintiens sans difficulté une cadence de pédalage qui me procure une vitesse de progression  satisfaisante.

Autre satisfaction les cales pieds que j’ai adaptés aux pédales d’origine du Brompton se révèlent efficaces et bien adaptés.

 

Donc j’enquille les kilomètres le long du Rhône : Saint Michel, Chavanay, Saint Pierre de Boeuf, Serrières (où je fais une pause pour casser la croûte) puis je continue toujours sur la Viarhôna, Saint Rambert, Andancette et me voici à Saint Vallier.

Il n’est pas trop tard dans l’après midi je décide de continuer vers le sud direction Tournon. Manque de bol à la sortie de Saint Vallier je loupe la Viarhôna et me voilà embarqué sur la 88. La route est plus pentue que la piste et surtout il y a pas mal de circulation… C’est néanmoins un bon test puisque je progresse sans trop de difficulté… avec toujours le vent dans le nez !

Pour finir je décide m’arrêter un peu avant Tournon dans un camping « l’Iserand » à Vion où nous avions fait étape avec Marie il y deux ans quand nous avions descendu le fleuve, elle en voiture et moi en Yakkair.

Super Camping, je recommande ! Propre ombragé nickel au niveau des sanitaires avec une piscine (que je n’utilise pas !).

Donc montage de la tente et farniente pour finir la journée à bouquiner tranquille… pas trop fatigué, tout va bien !

La tente…

Dans le sens de la remontée, juste avant le barrage d’Arras : je me demande s’il y a beaucoup de canoës qui remontent le fleuve ! (panneau indicateur qui signale le barrage)

La suite est facile à deviner après une bonne nuit retour sur la viaRhôna cette fois jusqu’au pied de la colline de Saint Michel où l’appelle pour que l’on vienne me chercher : pas question de grimper la côte avec mon barda … mais la pente est sévère…

Piste et fleuve…

Conclusion de cet essai :

Au total un petit peu moins de 100 km en deux jours, effectués sans grosses difficultés mais sur un terrain relativement plat avec il est vrai un très fort vent dans le nez le premier jour.

Il est donc possible de trimballer toute une logistique en rappelant que j’avais volontairement chargé la mule !

Si l’ensemble des bagages parait bien calés je vais néanmoins réduire le transport de bouffe, supprimer la glacière que vais remplacer par un sac à l’avant du vélo (le T bag de Brompton devrait faire mon affaire). J’aurais ainsi plus de facilité pour grignoter et boire en route, consulter une carte ou sortir le téléphone.

Le T bag, sac de randonnée de Brompton

Une remarque qui n’a rien à voir avec mon essai, c’est l’état calamiteux de la piste à certains endroits avec les racines des arbres qui gondolent la chaussée : on se fait secouer le panier à crottes !

Le Brompton et la Chubby n’ont pas bronché, à voir sur un temps plus long mais sûr, c’est du bon matos !

Le hic serait une grosse bosse à franchir … il faudrait pousser l’attelage et cela ne serait pas  de la tarte…

En ville et même sur la route avec la circulation tout va bien. Bon rien de bien étonnant dans tout ça mais j’ai ma réponse : une rando vélo/kayak en autonomie sur plusieurs jours est possible, reste à optimiser encore le poids mais je ne suis pas loin de ce que je voulais !

La suite maintenant cet été sur la Loire …

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